Paradoxes

Publié le par jdor

 

 

Egypte_La-place-Tahrir-au-Caire.jpg Egypte_La place Tahrir au Caire – 1er février 2011

 

Juste après la Tunisie, voilà que l’Égypte vient, à son tour, de faire tomber son tyran ! Extraordinaires peuples qui font chuter des régimes honnis sans violence ! Voilà de quoi ranger le mépris des dirigeants et intellectuels des pays occidentaux envers le monde arabe aux oubliettes de l’histoire ou dans la boîte des stupidités proclamées par nos gens supposés « intelligents » !

Certes, nul ne peut dire, aujourd’hui, ce que sera l’avenir de ces deux pays en attendant que d’autres les rejoignent dans les semaines ou mois à venir. Il ne faut tout de même pas oublier qu’il a fallu plus d’un siècle pour stabiliser la République Française ! Mais comment voulez-vous que je ne sois pas particulièrement admiratif des actes et réussites des révolutions tunisienne et égyptienne ? Il n’y a pas eu de violence du côté des révoltés, la majorité des  morts sont dus aux forces de police, dans les deux pays. Du côté de la Révolution Française, dont nous sommes si fiers, si on compare, très vite, ce fut une boucherie d’une extrême violence. Et, comme résultat, peu d’années plus tard, la révolution a engendré l’empire de Napoléon I, ce qui signe un échec cuisant.

L’ensemble des royautés européennes avaient peur des révolutionnaires français au point de tenter d’écraser la République naissante. Malgré le temps qui a passé, sur ce point, la situation est assez semblable. Car, aujourd’hui, c’est la majorité des puissances occidentales, tout au moins de leurs dirigeants, qui tremblent en raison du risque de l’arrivée au pouvoir d’islamistes purs et durs. Ces dirigeants feront tout, par tous les moyens possibles, pour tendre à communiquer cette peur à leurs peuples. Il ne fait pas de doute que dans les prochains temps, nous verrons fleurir des discours, voire des émissions sur nos médias, nous rappelant sans cesse que le terrorisme mondial est musulman et que l’on ne peut accorder sa confiance à des peuples musulmans même s’ils se proclament démocratiques. Il y a tout un courant de pensée, chez nous, qui tend à se convaincre et à convaincre que les Arabes et les musulmans en général sont incapables de concevoir et conduire une véritable démocratie, au trement dit une démocratie à l’image des nôtres, seules valables aux yeux de nos gouvernants. Ces dirigeants des pays riches sont incapables de faire confiance aux peuples des deux pays libérés, probablement parce que dans leur esprit, malgré cette réussite, les Arabes restent des êtres inférieurs, ne pouvant pas vivre, de façon quasi héréditaire, une véritable démocratie. Cette peur est encore la marque d’un profond mépris et d’un racisme qui ne dit pas son nom. Par ailleurs, on peut aussi penser qu’ils tremblent parce qu’ils ne pourront plus profiter des passe-droits pour leurs vacances ou des diverses importations qui ont engendré d’immenses profits pour nos multinationales, voire pour certains de nos dirigeants, tout en appauvrissant les peuples de Tunisie et d’Égypte...

Un cruel paradoxe

                                                    (Paroles de Français - source photo : http://www.newstele.com/)
paroles-de-francais-10402082ircef.jpgPendant ce temps, huit millions et quelques de Fra nçais posaient leurs séants dans leurs fauteuils ou canapés, sans doute avec de quoi grignoter et boire, pour écouter leur Président déclamer sa propagande préélectorale. Certes, tous n’étaient pas des inconditionnels de Sarkozy. À mon goût, cependant, cela fait bien trop de monde qui perd son temps à vouloir croire que le Président a changé, qu’il n’est plus cette marionnette qui nous fait honte, qu’il se serait calmé. C’est évidemment un rôle de composition qu’il est en train de nous jouer. Et je crains que certains de nos compatriotes ne tombent dans ce piège grossier ! D'ici aux prochaines présidentielles, ses partisans les plus fous finiront par le statufier. Déjà que lui, par moments, se considère comme un descendant direct du général de Gaule ! Ce qui, avouons-le, est un comble !

Certes, les sondages sont passablement cruels pour Sarkozy, à l’heure actuelle. Mais cela peut vite changer. Rien de tel que ce genre d’émission et de discours lénifiants pour retourner la crêpe-électrice, en ajoutant beaucoup de beurre dans la poêle, beurre qui n’est jamais qu’une très mauvaise margarine bien polluée. Le vrai beurre est réservée pour lui, ses proches et pour sa nombreuse clientèle de riches en tous genres. Tous ceux-là veulent le beurre mais également se payer la crémière-France.

Quittons cet intermède fermier pour un constat plutôt triste. Ceux qui sont incapables, aujourd’hui, d’avoir le courage des Tunisiens et des Égyptiens, ce sont les peuples avachis par la consommation et l’illusion des risques zéros ! Un ventre trop plein fait un être le plus souvent pétri de peur, ce dont notre pouvoir joue jusqu’à plus soif ! Faudra-t-il attendre que les huit millions de Français qui vivent sous le seuil de pauvreté commencent à crever de faim, ce qui avec les augmentations des prix de l’alimentation annoncés pour cette année pourrait venir plus vite que prévu, pour voir enfin, une large part de la population se révolter contre le système inique ?

Si les peuples veulent survivre, il n’y a pas d’autre choix que d’abattre la dictature des marchés, la tyrannie des financiers, tous ceux qui, sans avoir les mêmes apparences que les dictateurs déchus ou restants, exploitent et pillent les peuples de la terre. Mettre fin à la tyrannie financière marchande, nécessite obligatoirement de mettre fin aux carrières politiques, tant de droite que de gauche, qui sont complices des pilleurs. Voilà pourquoi je ne voterai, dans un peu moins d’un an et demi, ni pour Sarko ni pour Strauss-Kahn si ce dernier fini par se présenter.

L’espoir d’abattre le système qui nous domine depuis trente ans, ne viendra pas de chez nous, je le crains. L’espérance est plutôt du côté des peuples insoumis du Maghreb s’ils ont le courage, par leurs nouveaux pouvoirs, de refuser de s’inféoder au système de la globalisation et des privilèges des plus riches. Je suis convaincu, qu’aujourd’hui, le courage, la lucidité, la volonté et la sagesse se trouvent dans ces pays, d’autant plus que leurs démocraties vont être neuves, ce qui évite la paresse et la veulerie qui sévit dans les pays riches et ultra consommateurs.

Oserons-nous regarder ce qui se passe dans ces pays comme une espérance pour l’humanité entière et non comme une menace ? Oserons-nous les aider à éviter les risques de fanatismes militaires et religieux ? Oserons-nous dépasser nos peurs culturelles ? Ce qui se passe dans ces pays, à mon sens, dépasse le cadre local et interpelle tous les humains qui réclament justice, liberté et partage.

Jean Dornac
Paris, le 15 février 2011

Publié dans Sarkozy & Cie

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