Détournement de concepts

Publié le par jdor

 

Il est toujours avantageux de chercher à analyser les discours des politiciens, qu’ils soient ou non au pouvoir. Il suffit d’avoir écouté Jean-François Copé, ces derniers jours, pour comprendre que l’UMP est en plein désarroi, pour comprendre, également, son agacement pour ne pas dire plus, face à la fronde de certains membres de l’UMP envers le débat sur la laïcité, en fait, sur l’islam. Cela donne la mesure de la langue de bois, de l’irrespect pour les Français.

http://kamizole.blog.lemonde.fr/

la-voix-de-son-maitre.1303354076.jpgDans le domaine de l’irrespect des politiciens de tous bords, il y a cette « sale habitude » qu’ils ont tous ou pratiquement tous, de justifier leurs pensées et actes, y compris les plus antidémocratiques, je pense aux lois sécuritaires, par l’expression « Les Français veulent… ». C’est une supercherie absolue. Lorsque Claude Guéant affirme que « les Français ne se sentent plus chez eux », on pourrait l’attaquer pour diffamation, tant cela ne concerne qu’une part très relative de Français. Pour ma part, je prends  cela comme une insulte à mes capacités d’accueil de l’autre, quel qu’il soit.

Aujourd’hui, passé ces deux exemples, je veux parler, plus précisément du détournement de concepts, chose assez classique en politique, cette machine à récupérer tout et n’importe quoi pour tenter de faire tomber les citoyens dans les « bourses » politiciennes plus ou moins bien garnies d’électeurs. En écoutant l’émission de Guillaume Durand, « Face aux Français », de cette semaine, j’ai été frappé de la récupération des concepts faite par Rama Yade qui était invitée avec Jean-François Kahn.

Rama Yade est une jeune femme que j’ai plutôt appréciée lorsqu’elle était ministre aux droits de l’homme. Elle a été l’une des rares personnalités politiques de droite à oser dire à Nicolas Sarkozy ce qu’elle pensait. C’est suffisamment rare pour le souligner. Et ce dernier le lui a fait payer en l’excluant du gouvernement, même si, bien entendu, cela n’est pas présenté de cette manière… Contrairement à beaucoup d’autres ministres et responsables de l’UMP, on peut difficilement la taxer de « langue de bois ». En revanche, peut-être en raison de la propagande sarkozyste imposée aux Français depuis 2002, mais plus encore depuis la campagne présidentielle de 2007, elle cède, à mon avis, à la confusion des genres. Je m’explique. Durant l’émission, je l’ai entendue dire une chose qui m’a effaré : Pour elle, Sarkozy est « progressiste » et la gauche serait « conservatrice ». C’est, selon moi, là que se trouve le détournement des concepts.

Seraient donc « progressistes » les forces de droite qui nous ramènent aux temps de la domination de l’argent, du capital, des entreprises, tout ce qui opprime, au final, le peuple, toute la part du peuple n’appartenant pas à la « caste » des plus riches.

À l’inverse, seraient « conservatrices » les forces de gauche qui, du moins je l’espère, voudraient maintenir les droits sociaux acquis au fil du temps par le peuple.

Ce « détournement de concept », volontaire ou non, de la part de Rama Yade, est typique du discours des néoconservateurs américains qui, depuis plus de trente ans, détournent les concepts et les langages de manière à manipuler les peuples. En effet, pour eux et tous ceux qui soutiennent leurs discours sur cette planète, serait « progressiste » l’égoïsme évident et colossal des profiteurs du capitalisme. Selon eux, cet égoïsme qu’ils reconnaissent, revendiquent et valorisent, serait producteur de richesses nouvelles pour l’humanité entière. Discours ô combien creux que l’état social du monde d’aujourd’hui dément tous les jours. C’est l’égoïsme et la folie furieuse de nombreux banquiers aux USA qui est la cause de la « crise » depuis 2008.

Seraient donc « progressistes », les faiseurs de réformes, donc Sarkozy aussi, qui nous ramènent à un temps relativement comparable où les bourgeois capitalistes saignaient et exploitaient autant que faire se peut, leurs ouvriers, hommes, femmes et enfants. Ce type de « progressisme » a rendu quasi obligatoire les délocalisations très juteuses, ruinant une large part des citoyens occidentaux, exploitant le plus fortement possible, les citoyens des pays émergeants, là encore, notamment nombre de femmes et d’enfants. Drôle de « progressisme », ne trouvez-vous pas ?

Langue de bois ministérielle http://murielle.michon.parti-socialiste.fr/page/2/

ldb.jpgL’exemple du « progressiste » que serait Nicolas Sarkozy, selon Rama Yade, est d’une pauvreté affligeante. Ses amis riches et banquiers nous ont saignés, et continuent à le faire. Il faut tout faire pour sauver les responsables de la crise et rien pour aider les victimes, nous, de cette bande de pilleurs organisés. Si je reprends comme exemple frappant, le fameux slogan lancé pour la campagne de 2007, « Travailler plus pour gagner plus », je vous donne le cas le plus frappant de détournement manipulatoire. Dans une France déjà largement appauvri bien avant la « fameuse crise », trop de citoyens n’ont retenu que l’idée de « gagner plus ». Pardonnez-moi d’être un peu brutal, mais ce n’était qu’un « piège à cons ». C’est un slogan idéal pour vieux patrons capitalistes. Eux, n’auraient pas osé affirmer une telle grossièreté. Sarkozy le « progressiste » s’en est chargé. Plusieurs générations de femmes et hommes honteusement exploités ont lutté pour que nous puissions travailler moins tout en gardant le même salaire. Cela s’appelle la lutte pour la dignité humaine ! La proposition de Sarkozy revenait à faire de ceux qui tombaient dans son piège rien d’autre que des « bêtes de somme » à qui l’on donne une poignée de foin supplémentaire. On oublie, cependant, une chose absolument essentielle : Le travail salarié ne doit ni ne peut être la finalité de notre vie ! Et j’attends, et j’espère, qu’un esprit éclairé, ou un groupe d’esprits éclairés, trouve le moyen de faire grandir l’humanité en supprimant, peu à peu, le travail salarié qui n’est, pour une grande part des humains, qu’une forme un peu plus civilisée de l’esclavage. Vu mon âge, je ne verrais sans doute pas cette évolution, mais je l’espère de toutes mes forces pour les générations à venir.

Nous le voyons, nous avons vraiment intérêt à analyser les discours des politiciens. Affirmer qu’un dirigeant est « progressiste » alors qu’il est tout le contraire, n’est rien d’autre qu’une piteuse manipulation. Ce n’est pas ça qui redorera le blason de nos politiciens. Mais encore faut-il que les citoyens veuillent bien ouvrir grands oreille et yeux, pour voir et entendre ce qui se cache derrière les détournements de concepts.

Jean Dornac
Paris, le 2 avril 2011

Publié dans Réflexions

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