Primaires socialistes : De la dynamite !

Publié le par jdor

Il n’était pas trop prévisible, même si l’on pouvait s’en douter un tout petit peu, que les primaires du PS provoqueraient de tels effets, dans son propre camp, mais plus encore dans le camp adverse, l’UMP.

Côté socialiste

Première surprise, dans une France qui a de plus en plus tendance à s’abstenir, et trop souvent avec raison, c’est la fréquentation de ce scrutin, un peu plus de deux millions et demi de votants, alors même qu’il fallait débourser un euro au minimum.

Deuxième surprise, l’éviction de Ségolène Royal, sur un score que nul n’aurait osé pronostiquer à l’avance, pas même les sondeurs.

Troisième surprise : L’avancée très nette des idées d’Arnaud Montebourg.

A présent, il faut voir ce que va donner le deuxième tour, s’il va encore avoir des effets de surprise, notamment sur la fréquentation. A en juger sur le nombre de téléspectateurs qui ont regardé le débat final, il n’est pas impossible que, cette fois, la barre se situe aux environs de trois millions de votants. Cependant, même si Arnaud Montebourg devait donner des consignes de vote à ceux qui lui ont fait confiance, il n’est pas certain que les 17% d’électeurs qui lui ont donné leur voix, le suivraient. Dans cette part de l’électorat, l’esprit d’indépendance est très grand.  Par ailleurs, nos voix n’appartiennent à personne hormis nous-mêmes. Et il n’est pas évident que les deux candidats restants soient en capacité ou volonté de reprendre tout ou partie des idées de Montebourg. Pour ces « anciens » du parti, les idées de Montebourg sont tout de même iconoclastes et très loin du train-train social-démocrate.

Attendons dimanche prochain, au soir, pour en savoir plus, les surprises pouvant aller n’importe où comme le vent qui, seul, choisit son chemin…

Du côté de l’UMP et de Sarkozy

C’est de ce côté-là que les surprises sont les plus fortes, que la dynamite des primaires a été la plus efficace.

Il était surprenant de voir et écouter un Jean-François Copé qui avait de la peine à dissimuler sa rage face à la joie des invités socialistes au journal télé de France 2, dimanche soir. Avec quelle force, je dirais presque avec quelle haine, il a dit sa joie que ces primaires seront bientôt terminées. Il en fut de même, lundi soir, toujours sur France 2, dans « Mots Croisés », pour Nadine Morano. Par ses excès, sa mauvaise foi, ses cris presque hystériques, elle sert vraiment bien le PS. Voilà un vibrant renfort pour le possible succès des socialistes aux prochaines élections présidentielles. Le Figaro, par son manque d’objectivité criant, lui aussi, ne peut que servir de repoussoir idéologique pour tout citoyen n’appartenant pas à l’UMP.

Comme je l’ai lu sur Twitter : « Heureusement que les mecs de droite sont là pour nous donner envie de voter à gauche » !

Sous la rage apparente de certains membres de l’UMP, même s’ils ont tenté de la dissimuler, il y a aussi la peur qui s’installe. Les dérapages de langage, comme celui de Jean-François Copé, hier, affirmant que les idées de Arnaud Montebourg sont celles d’un bolchevique, c’est bien la panique devant un phénomène qu’il n’avait pas prévu qui lui fait ainsi dire n’importe quoi. Du côté de Morano, nous avons pu apprendre que tous ceux qui ont choisi Montebourg sont des gauchistes. On se serait cru revenu plusieurs décennies en arrière, du temps où l’URSS existait encore et où le Parti Communiste Français avait encore de l’influence. Il y avait des intonations rétro dans ces mots et phrases.

La peur qui semble saisir la droite, depuis les premières estimations sur les primaires socialistes de dimanche soir, est plutôt justifiée. Sans que personne ne puisse en être encore certain, à l’heure actuelle, ce nouveau succès de la gauche, montre une dynamique certaine en sa faveur, tout en dessinant, élections après élections, la chute de la droite dans l’opinion et dans les urnes. Nicolas Sarkozy, qui après le premier débat entre les candidats aux primaires, s’était moqué d’eux avec un ton et une mine bien méprisants, cette fois, était un peu plus serré dans ses petits souliers. Il n’a trouvé à dire, pour contrer le succès de ses adversaires, qu’une seule chose : Ce type de consultation serait contraire à la Constitution. Cet argument a beaucoup fait sourire dans de très nombreuses chaumières, tant le pouvoir, le sien et celui de son parti, l’UMP, aura « enjambé » la Constitution depuis quatre ans.

Quelques erreurs de l’UMP

L’une des premières aura été la tentative de l’UMP de vouloir empêcher cette élection, il y a quelques mois, avec le prétexte ridicule de danger pour la démocratie en raison de la possession des listes électorales par le PS, tout en ajoutant, qu’ainsi, les municipalités PS sauraient qui a voté ou non.  C’était certes amusant pour le parti majoritaire de tenter de torpiller ce scrutin, mais à l’évidence, nombre d’électeurs n’ont pas apprécié cette tentative d’obstruction sur une avancée de la démocratie.

Par ailleurs, nombreux sommes-nous, en France à difficilement supporter « les éléments de langage » venant directement de l’Elysée, éléments imposés à tous les intervenants de la majorité lors de leur passage à la télévision ou à la radio. Quoi qu’on en pense, le peuple Français est majeur et n’a nul besoin de clones qui distribuent le même message, avec les mêmes mots sur toutes les ondes. En ce sens, Jean-François Kahn a fait fort lors de Mots Croisés, lorsqu’il a sorti des feuillets estampillés UMP, donnant, plusieurs jours à l’avance, les « éléments de langage » à réciter dès la fin du premier tour de scrutin. On a vu la colère et la gêne de Nadine Morano dès que cette feuille est apparue.

Ce qui est frappant, c’est la zizanie qui semble parcourir la majorité UMP. Il est difficile de dire à quoi cela va aboutir.  Entre Sarkozy qui ne veut pas entendre parler de primaires et Fillon qui les considère comme « un processus moderne qui convient à droite comme à gauche, pour toutes les grandes élections », même si c’est pour après 2012 ; entre JF Copé et Bernard Debré, le premier maudissant les primaires, le deuxième les souhaitant, etc… D’un tel bouillon, tout et n’importe quoi peut sortir, mais surtout la désunion…

Un point essentiel développé par Jean-François Kahn

Lors de « Mots croisés », c’est sans doute lui qui a dit la chose la plus censée expliquant les primaires et la démondialisation prônée par Arnaud Montebourg. Selon lui, et comment ne pas être en accord, les citoyens veulent avoir la parole. Et ceux qui ont voté pour Montebourg, ainsi qu’une foule d’autres dans le pays, constatent l’échec de la mondialisation et ses effets pervers. A partir de ce constat, que veulent ces citoyens : Qu’on change de système ! Le rafistolage, poser des rustines sur ce système, tous ces citoyens n’en veulent pas ! A l’exemple des indignés qui essaiment un peu partout dans le monde, c’est un autre monde qu’ils veulent !

Dimanche prochain, que ce soit Martine Aubry ou François Hollande qui sortira vainqueur de scrutin final, il ou elle aurait bien tort de ne pas entendre cette demande pressante d’une large part du peuple de gauche, demande qui déborde, d’ores et déjà, les limites de l’électorat du PS. Ces citoyens attendent que le candidat choisi fasse, s’il est élu l’an prochain, ce que Nicolas Sarkozy est incapable de faire. L’enjeu des prochaines présidentielles est là.

Jean Dornac
Paris, le 13 octobre 2011

Publié dans Réflexions

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