DSK : Pourquoi la nécessaire compassion ?

Publié le par jdor

 

En quoi consiste-t-elle ?

 

Ma prise de position en faveur de la compassion pour Dominique Strauss-Kahn peut en avoir surpris, voire choqué, plus d’un. Je crois, cependant, qu’il y a beaucoup de confusions et de malentendus sur ce qu’est la nécessaire compassion.

Ce que n’est pas une compassion vraie et ce qu’elle devrait être

La compassion n’est jamais une excuse pour un crime commis par un individu. La compassion vraie n’est pas une faiblesse qui favoriserait, voire inciterait, les être dévoyés à poursuivre leurs actes. La compassion n’interdit pas la sanction. Une véritable compassion ne doit jamais voiler la vérité aux yeux de celui qui la ressent et l’exprime.

http://theaujasmin.blogspot.com/2011/06

Carolus-Duran--Danae.jpgTelle que je la vis et la pratique, elle consiste, une fois reconnu un crime ou un délit, à regarder l’homme (ou la femme) dans la nudité de son être profond face à ce qu’il a commis. C’est ressentir de la tristesse pour un être déchu en raison de ses actes. L’homme reste un frère pour l’homme, race particulière dans le monde animal, théoriquement capable d’intelligence et d’Amour. Capable aussi, s’il a un tant soi peu de lucidité, de comprendre que nul n’est à l’abri d’un dérapage, plus ou moins grave, en fonction des circonstances de la vie, capable de comprendre encore que lui ou l’un des siens pourrait se retrouver, un jour, à la place de celui qui est montré du doigt. Celui qui montre de la compassion doit avoir la force de ne pas juger, mais de chercher à comprendre. La vie est, le plus souvent, une longue épreuve pavée de toutes sortes de pièges. Qui donc, peut jurer que, jamais, il ne fera rien de répréhensible ?

Le jugement doit être réservé aux Institutions chargées de cela et non pas aux « brèves de comptoir », même si nous savons que le jugement des hommes, de l’Institution en l’occurrence, est loin d’être parfaite.

La compassion pour qui dans l’affaire DSK ?

1) La victime présumée

En tout premier lieu, notre compassion doit aller vers la victime si, effectivement, elle a subi le viol ou la tentative de viol. Il faut être complètement stupide, ignare, primaire, pour oser rire d’un viol, pour oser minimiser l’effet tragique que vit une femme violée. À mes yeux, c’est un acte de barbarie, moralement impardonnable. Ce que les violeurs imposent comme souffrances terribles à leurs victimes, eux-mêmes ne l’accepteraient pas.

À mon avis si, aujourd’hui, peu de responsables socialistes ont parlé de la victime, donnant l’impression qu’ils n’en avaient rien à faire, c’est pour plusieurs raisons :

- En premier lieu, malgré la mise en scène médiatique odieuse organisée par le système judiciaire américain, Dominique Strauss-Kahn est et reste « présumé innocent ». Et, par conséquent, la jeune femme américaine n’est qu’une « victime présumée ». Cela peut sembler n’être qu’un détail, mais c’est tout de même important. Il n’est pas anodin que certains proches de la majorité, je pense à ce « journal Sarko » qu’est le Figaro, au travers d’Ivan Rioufol, chroniqueur du canard en question, oublient la présomption d’innocence de DSK et s’alignent sur la Justice américaine en considérant que la jeune femme n’est pas une présumée victime mais une victime évidente. Drôle de conception de la justice…

- En second lieu si, probablement, nombre de socialistes et notamment les dirigeants, n’ignoraient rien des penchants lourds de DSK par rapport aux femmes, je suis convaincu qu’aucun d’eux ne pouvait l’imaginer en tant que violeur.

Il est certain, si la victime présumée devient, après l’enquête, la victime certaine, que nous lui devront prioritairement toute notre compassion et ce, d’autant plus qu’elle va subir, à cause du système judiciaire américain, une « double peine » au travers de l’enquête plus que minutieuse sur sa vie qui va être entreprise, sans pitié, par la défense de DSK.

2) La famille et les véritables amis

http://www.gala.fr

anne sinclair referenceLa compassion allant naturellement vers les êtres qui souffrent, innocents ou coupables, il ne peut être question d’oublier la famille et les amis de l’accusé DSK. Il semble qu’il règne un grand amour entre Anne Sinclair et Dominique Strauss-Kahn. Beaucoup pensent, cependant, que c’est un amour de façade, un amour par intérêts réciproques. C’est possible, mais eux seuls savent. Cependant, à présent que DSK n’est plus rien, si Anne Sinclair reste avec lui, surtout en cas de nombreuses années d’emprisonnement s’il est reconnu coupable, alors, nul doute qu’il s’agit d’un grand amour. Et, dans cette perspective, j’imagine sans mal, la douleur que traverse cette femme, depuis dimanche dernier. Douleurs face à l’odieuse campagne médiatique venue des USA, les premiers jours ; doutes et douleurs, probablement, sur ce qui s’est réellement passé dans la chambre de l’hôtel ; douleurs encore, à mon avis, face à la campagne, surtout sur internet, contre son mari. Si elle l’aime comme je le crois, elle ne peut que se sentir profondément blessée, elle aussi par tous les lazzis et autres cruautés qui courent sur la toile. Il m’est donc parfaitement impossible de ne pas ressentir une grande compassion pour cette femme qui se trouve dans la position d’une victime collatérale.

Il en va, évidemment de même, pour les enfants du suspect. Qui peut ignorer ce que doit ressentir une fille, un fils, d’un homme dénigré à ce point alors même que nul, en-dehors de lui et de la femme de ménage, ne sait quelle est la vérité ? Faut-il avoir un cœur sec et franchement méchant pour ignorer cet aspect des choses ?

Et c’est encore la même chose pour les véritables amis de DSK, même si, au cas où il serait reconnu coupable et condamné, sans doute, les rangs de ces derniers s’éclairciraient subitement et rapidement. C’est dans les épreuves que l'on peut faire le tri entre les véritables amis et les requins…

3) Lui-même

©REUTERS/Mike Segar

713103 dominique-strauss-kahn-head-of-the-international-monCe qui attire ma compassion, et je ne suis pas le seul fort heureusement, c’est la brutalité de la chute que vient de connaître cet homme. Et, pire, s’il se sait innocent, la souffrance doit être très violente face à tout ce qui se dit dans les médias, face à tous les soupçons et, parfois, les accusations.

Je l’ai dit, je n’aurais jamais voté pour lui aux prochaines élections. Trop de choses nous séparaient. Cependant, ce n’est absolument pas une raison pour le piétiner alors qu’il est à terre !

À présent, formellement inculpé sous sept chefs d’accusation, il a devant lui les épreuves souvent très lourdes qui attendent tous les accusés. C’est un chemin que pour rien au monde, je ne voudrais connaître…

En règle générale, pourquoi éprouver et entretenir la compassion ?

Je crois que cela tient de la vision que nous avons de la vie et de l’humanité. Et ceci en-dehors de toute notion religieuse.

Si nous faisons partie des « profiteurs de la vie », que ce soit sur le plan financier, politique, sexuel, ou tout autres plans de ce type, alors, à quoi bon avoir de la compassion pour ses victimes ? Ce serait incongru.

En revanche, si nous sommes conscients que l’humanité, à force d’égoïsme, à force de se haïr, à force de rejeter l’Amour entre humains, va inévitablement à la catastrophe finale, alors, pour changer le cours de l’histoire, seuls l’Amour et la compassion nous permettront de sauver ce qui peut l’être encore. Et dans ce cas, c’est moins pour nous-mêmes que pour les générations à venir, que nous devons être ou devenir des humains compassionnels.

Jean Dornac
Paris, le 21 mai 2011

Publié dans Les "affaires"

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